Contexte et justification
Un enfant sur quatre âgé de moins de 5 ans dans le monde souffre de malnutrition chronique. A Madagascar, plus de 47% d’entre eux sont affectés par ce fléau. Comparés aux enfants vivant dans les pays industrialisés, les enfants vivant dans les pays en voie de développement présentent une réponse immunitaire diminuée à certains vaccins administrés oralement, comme ceux contre le Rotavirus, la Poliomyélite, la Fièvre Typhoïde et le Choléra. Une des hypothèses avancées expliquant cette inefficacité des vaccins oraux est que la malnutrition chronique pourrait conduire au phénomène observé. La malnutrition chronique est due à différents facteurs et principalement à une nutrition pauvre et mal équilibrée et à une insuffisance en vitamines et autres micronutriments. Récemment, le syndrome de l’Entéropathie Environnementale Pédiatrique ou EEP (inflammation chronique de l’intestin grêle due à une exposition répétée à un environnement hautement contaminé par les bactéries) a été démontré comme jouant un rôle dans la malnutrition chronique et pouvant aussi influencer la constitution et la réponse du système immunitaire face à des agressions.
Le projet “Immunohealth” constitue le volet Immunologique (WP7) du projet de recherche multidisciplinaire, translationnel et multicentrique AFRIBIOTA qui a pour objectif de mieux comprendre la malnutrition chronique infantile et plus particulièrement de déterminer la prévalence et la physiopathologie de l’Entéropathie Environnementale Pédiatrique en Afrique Sub-Saharienne et à Madagascar.
Objectifs
L’objectif principal du projet “ImmunoHealth” est d’étudier finement les changements immunologiques du système immunitaire mucosal et systémique dans le contexte de la malnutrition chronique et/ou de l’EEP afin d’identifier des biomarqueurs immunologiques permettant une meilleure prise en charge des patients.
Méthodes
Une pré-étude a été réalisée en 2016 afin de valider, sur un échantillon limité (15 enfants), les méthodologies et les protocoles. Trois groupes d’enfants de 2 à 5 ans ont été considérés : malnutris chroniques sévères, malnutris chroniques modérés et normo-nutris.
- Les analyses quantitatives et qualitatives des cellules immunitaires du sang périphérique ont été faites par cytométrie de flux 3-couleurs en utilisant des panels spécifiques d’anticorps permettant de détecter les populations lymphocytaires B, les monocytes et les lymphocytes T.
- Les cytokines et chimiokines ont été analysées en multiplex (système x-MAP-MagPix) après stimulation des populations lympho-monocytaires circulantes (système TruCulture-MyriadRBM) avec des stimuli mimant l’agression par des bactéries à gram négatif (Lipo-polisaccharide) et des virus (Poly:IC) ou activant les cellules T (antigène Staphylococcus Enterotoxin B). Les profils cytokiniques ont aussi été analysés dans les échantillons de selles et d’aspirations duodénales.
- Les différentes classes d’Immunoglobulines (IgA, IgG, IgM et IgD) ont été dosées dans le sérum, les selles et les aspirations duodénales en utilisant un test commercial en multiplex.
Résultats et discussion
Au cours de la pré-étude du projet AFRIBIOTA (Décembre 2015 – Mai 2016), les efforts ont été axés sur la mise en place et la validation des différents protocoles immunologiques (cryoconservation des lymphocytes circulants, stimulation TruCulture, analyses en cytométrie de Flux, analyse des cytokines et Ig) nécessaires à la réalisation de la grande étude dans laquelle 450 enfants seront inclus. Des marquages en cytométrie 8-couleurs ont aussi été développés afin de mieux caractériser les différentes sous-populations de lymphocytes B, les monocytes et les différentes populations et sous-populations de cellules T (T régulatrices, Th17). Cette première phase du projet a aussi été marquée par des transferts de technologie et des formations du personnel scientifique afin de renforcer les compétences locales en immunologie cellulaire, en cytométrie et en analyses de données. La grande étude a commencé en Novembre 2016.
La réalisation de ce projet ImmunoHealth a été soutenue par l’acquisition d’un cytomètre de nouvelle génération : l’Attune NxT (Thermo Fischer Scientific) permettant d’analyser 11 paramètres (FSC, SSC et 9 Fluorochromes) en cytométrie de flux. Ce cytomètre a été financé par l’Institut Pasteur-Paris, Direction du Développement (DDGO), projet “Immunomonitoring”.
Parallèlement à ces études immunologiques, l’Unité a aussi été impliqué dans le WP3 du projet qui vise à analyser l’écosystème intestinal. Pour le volet « analyses des parasites opportunistes intestinaux », des analyses moléculaires en qPCR en multiplex (microsporidies, entamoeba, giardia et cryptosporidies) ont été mises en place et validées au sein de l’Unité.
Impact
A terme, les données acquises permettront d’identifier des biomarqueurs immunologiques afin d’améliorer le diagnostic et prévenir les dysfonctionnements immunologiques qui surviennent au cours de l’EEP.