Institut Pasteur de Madagascar

Projet RISE : Restitution du projet DRUGMIS sur les pratiques d’utilisation et de prescription d’antibiotiques chez les femmes enceintes et allaitantes

La restitution des résultats du projet DRUG MISUSE (DRUGMIS) s’est déroulée le mercredi 20 septembre 2023 à l’hôtel Coco lodge de Mahajanga.  Le but de cette étude est d’analyser les pratiques d’utilisation d’antibiotiques chez des femmes enceintes et allaitantes à Mahajanga. Elle s’inscrit dans le cadre du Projet RISE (Recherche, Innovation, Surveillance, Evaluation), financé par l’Agence des Etats-Unis pour le Développement International (USAID) et mis en œuvre par l’Institut Pasteur de Madagascar (IPM).

Les antibiotiques sont utilisés pour traiter et prévenir les infections bactériennes. Actuellement, près de 700 000 décès annuels sont attribués aux résistances aux antibiotiques. Si la situation reste inchangée, près de 10 millions de décès seront causés par des infections liées à des bactéries résistantes en 2050 (OMS, 2019). La résistance aux antibiotiques représente l’une des plus graves menaces sur la santé mondiale. C’est un phénomène naturel mais les mauvais usages accélèrent le processus. Résultats, un nombre croissant d’infections, comme la pneumonie, la tuberculose et la salmonellose sont de plus en plus difficiles à traiter, entrainant une prolongation des hospitalisations, une augmentation des dépenses médicales et une hausse de la mortalité. Toutes les couches de la population peuvent être concernées, y compris les femmes enceintes et allaitantes. Dans les pays à faible revenu, près de 7 millions d’infections bactériennes néonatales graves surviennent chaque année. A Madagascar, peu d’études ont porté sur les pratiques d’acquisition et d’utilisation des antibiotiques en santé maternelle et infantile. Les connaissances sur la situation de la résistance aux antibiotiques sont encore sous explorées dans le pays, d’où l’importance de mener des études comme DRUGMIS.

 

115 femmes enceintes et/ou allaitantes ont participé à l’étude qui portait sur les pratiques de prescription et d’utilisation des antibiotiques par ces femmes en zone urbaine et rurale à Mahajanga.

Le projet DRUGMIS résulte d’une collaboration entre l’IPM, le CIRAD (Centre de coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement), la Direction de la santé familiale au sein du Ministère de la Santé, la Direction régionale de la santé de Boeny et plusieurs autres partenaires. Les opinions et points de vue des femmes enceintes et allaitantes investiguées dans le cadre de l’activité, ont permis de mettre en exergue des types de pratiques particuliers et différents selon le lieu de résidence. Pour recueillir leurs opinions, les responsables du projet, ont utilisé la méthode Q comme l’explique Dr Sitraka RAKOTOSAMIMANANA, co-investigateur de projet (IPM) : « La méthode Q en termes simples est une approche mixte, alliant démarche quantitative et qualitative pour obtenir les points de vue ou opinions subjectifs d’individus autour d’une thématique. En d’autres termes, cette méthode consiste à demander aux personnes enquêtées de se positionner par rapport à des affirmations et d’argumenter leurs opinions autour de ces affirmations ».

Pour en apprendre davantage sur la méthode utilisée pour recueillir les avis de ces femmes, découvrez cette vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=kpnsUQxKOqU

 

Une restitution sous le signe de la participation

Etaient présents lors de la restitution, des responsables du projet DRUGMIS de l’IPM et du CIRAD, de l’équipe de coordination du projet RISE, ainsi que des représentants de la Direction régionale de la santé Boeny, du médecin inspecteur de Mahajanga I et II, des centres de santé de base de Mahajanga I et II, des agents communautaires et des participantes à l’étude.

Après la présentation générale et une séance de questions-réponses, une séance de travail participatif a été organisée, comme l’explique Dr Daouda KASSIE, chercheur au CIRAD et à l’IPM : « Durant les sessions participatives, il a été demandé aux différents invités de classer 14 affirmations/ recommandations relatives aux conclusions de l’étude qui portaient sur l’amélioration de l’usage et le suivi des antibiotiques. Sur une échelle de 1 à 5, il fallait que les différents participants notent les affirmations selon leur ordre d’importance ou selon les axes qu’ils estimaient prioritaires. En fait, par une simulation en direct, nous leur avons montré comment concrètement la méthode Q peut être utilisée pour ressortir les opinions consensuelles/redondantes de plusieurs personnes. Deux groupes avec des opinions homogènes ont été dégagés après cette simulation.

Les résultats du projet doivent permettre d’avoir une base de réflexion dans le but d’ouvrir des perspectives dans la communication « soignants-soignés », notamment en matière d’administration de médicaments et d’antibiotiques pour résoudre les risques d’usage inapproprié d’antibiotiques et de réduire la résistance aux antimicrobiens en santé maternelle et infantile à Madagascar. « Et ceci, complète Dr Sitraka RAKOTOSAMIMANANA, à partir d’une étude plus opérationnelle axée sur l’expérimentation de techniques innovantes en matière de prescription de médicaments / d’antibiotiques. Une autre perspective serait de prendre en compte les réalités et les contextes des populations à une échelle plus fine en matière de sensibilisation/information sur l’usage des antibiotiques. En effet, l’usage des médicaments et des antibiotiques n’est probablement pas la même chez les populations selon leurs caractéristiques socio-démographiques (âge, sexe, niveau d’éducation…), géographiques (urbain/rural) et selon leurs vécus personnels. »

 

Réactions des personnes ayant participé à la restitution

Mme Nirina, Agent Communautaire, Mahabibokely :

« J’ai accompagné l’équipe de l’IPM durant le projet DRUGMIS, car je connais bien le quartier et ses habitants. A la suite des enquêtes, j’ai remarqué que les mères allaitantes et les femmes enceintes me sollicitaient pour avoir des conseils sur les personnes à consulter lorsqu’elles étaient malades pour éviter qu’elles prennent n’importe comment des médicaments, notamment les antibiotiques ».

 

Mme Nirina, Majunga I :

« J’ai participé à l’enquête DRUGMIS réalisé par l’IPM. Les échanges concernaient l’utilisation des antibiotiques par les femmes enceintes et allaitantes. Les discussions ont duré quelques heures, car il y avait 36 affirmations sur lesquelles on m’avait interrogée.  J’ai retenu que les femmes enceintes et allaitantes devaient faire très attention face à l’utilisation des antibiotiques. Pour ma part, je suis toujours très vigilante, car ce sont des médicaments très puissants et je n’en prends que lorsque le médecin m’en prescrit ».

 

Dr Paulette, Chef du Centre de Santé de Base de Mahavoky Atsimo :

« J’ai participé aux enquêtes au sein du centre de santé dont je suis responsable. Ces échanges étaient en quelque sorte une remise à niveau sur l’utilisation des antibiotiques pour les femmes enceintes allaitantes. En effet, nous avions l’habitude de prescrire systématiquement les antibiotiques lorsque nous recevions ces patientes, mais grâce aux résultats du projet DRUGMIS, on connait aussi le point de vue de cette population sur l’usage des antibiotiques. »

 

Dr Tsito Ravalitera, DRS par intérim et chef de service médico-sanitaire dans la région Boeny :

« Le projet DRUGMIS est très important, car il permet de connaître les risques encourus par le mésusage des antibiotiques surtout par les femmes enceintes et allaitantes. Je trouve très encourageant qu’à l’issue des enquêtes, plusieurs femmes ont conscience qu’il est crucial de suivre les conseils et les prescriptions des médecins. »

Quitter la version mobile