Plus de 30 scientifiques et cliniciens malgaches et internationaux sont réunis du 07 au 09 mars 2016, à l’Institut Pasteur de Madagascar, pour le lancement officiel du projet AFRIBIOTA, un ambitieux programme de recherche multidisciplinaire destiné à mieux comprendre la malnutrition infantile chronique. Associant recherches fondamentale et clinique, notamment l’étude du microbiote intestinal des enfants, sciences sociales et neurosciences, ce programme innovant vise à développer à terme de nouvelles approches de diagnostic facilement utilisable sur le terrain.
Un enfant sur 4 âgé de moins de 5 ans dans le monde souffre de malnutrition chronique. A Madagascar, 47% d’entre eux sont affectés par ce fléau. La malnutrition est un des facteurs majeur du fort taux de mortalité infantile chez les moins de 5 ans qui, dans ce pays, culmine à 56 décès pour 1000 naissances. Elle peut également être à l’origine d’anomalies du développement physique, de performances cognitives amoindries et de certaines difficultés d’apprentissage. Elle alimente ainsi le cercle vicieux de la pauvreté en pesant lourdement sur les possibilités de développement sociaux-économique des générations futures.
Une approche multidisciplinaire innovante pour mieux comprendre la malnutrition chronique.
Coordonné par le Pr Philippe Sansonetti, responsable de l’unité de Pathogénie microbienne moléculaire à l’Institut Pasteur à Paris, le programme de recherche AFRIBIOTA propose une approche multidisciplinaire innovante pour mieux comprendre la malnutrition chronique. Les scientifiques vont en particulier s’intéresser à un syndrome inflammatoire chronique de l’intestin connu sous le nom d’entéropathie environnementale pédiatrique (PEE). Ce syndrome qui perturbe le fonctionnement de l’intestin, empêche l’assimilation correcte des aliments et affaiblit le système immunitaire, est aujourd’hui reconnu comme une des causes majeures de la malnutrition. : « On estime que la PEE touche plus de 75% des enfants dans les pays en développement. En dépit de son impact massif sur la santé infantile, les données scientifiques sur ce syndrome sont quasiment inexistantes » explique le Pr. Sansonetti.
En collaboration avec les Instituts Pasteur de Madagascar et de Bangui et avec l’appui de l’Office National de la Nutrition et du Ministère de la Santé Publique malgaches, AFRIBIOTA va mobiliser plus de 50 chercheurs, cliniciens et professionnels de santé dans une approche multidisciplinaire inédite. Une étude clinique menée dans chaque pays auprès de 460 enfants identifiés dans les hôpitaux partenaires du projet permettra de mesurer le nombre d’enfants (prévalence) souffrant d’entéropathie environnementale pédiatrique, de mieux comprendre les mécanismes biologiques et physiologiques qui en sont à l’origine et d’identifier des marqueurs de ce syndrome pour développer un test de diagnostic facilement utilisable sur le terrain.
« A l’aide de technologies de séquençage les plus avancées actuellement, nous étudierons les perturbations de la flore de l’intestin supérieur et de l’estomac dont nous pensons qu’elles sont à l’origine de l’entéropathie. Cela n’a jamais été fait jusqu’ici » commente le Pr. Sansonetti.
Cette partie du projet sera complétée par deux approches innovantes : (i) une étude anthropologique pour comprendre en profondeur ce qui peut, dans les pratiques d’alimentation et d’hygiène ou sanitaire de la mère, conduire à l’installation d’un état pathologique chez les enfants ; (ii) une étude de neuroscience réalisée auprès des enfants participant à l’étude examinera le lien possible entre PEE, malnutrition et troubles psychomoteurs. L’ensemble des données obtenues dans les différentes études sera compilé via une modélisation mathématique et permettra ainsi d’obtenir une vision holistique de la PEE qui servira de base pour développer des interventions efficaces au bénéfice de la santé des enfants.