Santé et Sciences Sociales
Amélioration de la santé en milieu carcéral à Madagascar : formation des personnes détenues aux premiers secours et à la reconnaissances des symptômes des maladies fréquentes
Contexte : Nous disposons de peu de données publiées sur la santé en milieu carcéral, cependant, les constats des intervenants restent unanimes quant à l’extrême vulnérabilité des personnes détenues. En plus de l’incarcération, l’accès à la santé des personnes détenues est entravé par de nombreux défis dont la surpopulation et les conditions de vies précaires (hygiène, accès à la nourriture et à l’eau insuffisant, enfermement de 17h à 7h dans les chambres surpeuplées …). Vient s’ajouter à cela l’insuffisance de personnels soignants. Actuellement, 60 soignants sont en charge de la santé des 30 000 personnes détenues dans le pays.
Dans le cadre du projet MIARINA visant à améliorer la prise en charge globale de la tuberculose et du VIH en milieu carcéral, l’Institut Pasteur de Madagascar (IPM) a mené une étude qualitative portant sur le parcours de soins des personnes détenues atteintes de ces infections. Au total, 106 entretiens individuels et 8 entretiens groupés ont été conduits auprès des personnes incarcérées, du personnel de santé et des agents pénitentiaires.
Résultats scientifiques : Les résultats de cette étude mettent en lumière le rôle d’une catégorie d’acteurs qui vient appuyer les professionnels de santé surchargés : les personnes détenues elles-mêmes. Sans formation, elles sont pourtant en première ligne du parcours de soins en ayant pour rôle de référer leurs codétenus.
Suite à la restitution des résultats de cette étude, les acteurs de la santé en milieu carcéral ont jugé urgent et indispensable de s’appuyer sur leur expertise et de les inclure dans les programmes de santé pour améliorer le système de santé carcéral. C’est ainsi qu’a été créée une formation pilote dont le contenu répond aux besoins émis par les personnes détenues et par les soignants pénitentiaires.
Mise en place d’actions concrètes en réponse aux résultats : Le projet MIARINA a organisé des formations dans les 4 établissements pénitenciers cible du projet (Antanimora, Manakara, Mahajanga et Toamasina). Ces formations visent à améliorer les connaissances des personnes détenues impliquées en santé. La formation porte à la fois sur les soins de premiers secours (réanimation, détresse respiratoire et cardio-vasculaires, brûlures, hémorragies, …) ainsi que sur la reconnaissance des symptômes des maladies les plus fréquentes en milieu carcéral.
Au total, 240 personnes détenues ((appelés « chefs de chambre », « chefs quartier » et « corvées infirmerie ») et 33 intervenants pénitenciers ont été formés (infirmiers, agents pénitenciers, encadreurs et éducateurs spécialisés).
Ces missions de formation, organisées par l’IPM, se sont déroulées en août et septembre 2022 en présence des formateurs de la Croix Rouge Malagasy, d’EKAR-CES, des responsables du Ministère de la Justice et des personnels des établissements pénitenciers cibles.
Des outils didactiques adaptés ont été créés et mis à disposition des personnes détenues lors des sessions de formations.
« Cette formation est très importante, car elle assurera la continuité de la prise en charge des personnes malades au sein des établissements carcéraux », estime Dr RABEMANANTSOA Alain, Chef de service de la santé des personnes détenues au sein du Ministère de Justice.
Impact : Cette formation pilote à destination des personnes incarcérées impliquées en santé permet d’instaurer les bases du secourisme et de la reconnaissance des symptômes des maladies les plus fréquentes en milieu carcéral. Cela contribuera à améliorer le référencement des malades aux infirmeries tout en impliquant et responsabilisant les personnes détenues en charge de ces tâches.
Cette activité pose les bases d’une nouvelle approche pour l’amélioration de la santé en milieu carcéral en s’appuyant sur les personnes détenues elles-mêmes.
Au vu de la retombée positive de cette activité à court terme, la pérennisation de ces formations ainsi qu’une mise à l’échelle dans toutes les maisons centrales du pays sont espérées au-delà du projet MIARINA.
« Le projet MIARINA bénéficie du soutien de L’Initiative mise en œuvre par Expertise France »Application du massage cardiaque par une personne détenue
Présentation de l’outil didactique par les formateurs